Imaginez : vous invitez des amis, vous n’avez pas eu le temps, ou envie, (ou les invités ne le méritent pas) de vous mettre au fourneau toute la journée, vous sortez un plat tout prêt, vous le décongelez, le réchauffez, ajoutez un brin de persil dessus (même pas lavé, tiens) et vous vantez toute la soirée que c’est fait maison. Ça ne se fait pas, on est d’accord ? A fortiori pour les restaurants, dans lesquels on paie pour manger !

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On en a rêvé, le législateur l’a fait

Un décret du 11 juillet 2014 a (enfin) précisé les critères stricts du label « fait maison » apposé par les restaurateurs sur leur carte. Le décret est entré en vigueur le mardi 15 juillet 2014. Les restaurateurs ont jusqu’au 1er janvier 20015 pour mettre leur carte en conformité avec le décret.

Un pictogramme officiel (image ci-dessus) permettra aux clients de reconnaître rapidement le « fait maison » en cherchant leur restaurant. Le pictogramme sera placé devant les produits faits maison de la carte, ou en haut du menu si tous les plats de celui-ci sont faits maison! La mention obligatoire sera ajoutée sur la carte : Les plats « faits maison » sont élaborés sur place à partir de produits frais.

L’ajout du pictogramme n’est pas obligatoire, la mention écrite « fait maison » suffit, mais on peut penser que les restaurateurs préféreront ajouter le pictogramme, plus visuel pour attirer les clients!

Le label « fait maison » peut être ajouté à la carte d’un restaurateur si :

  • le produit alimentaire utilisé n’a pas été transformé de manière importante (comprendre, par un industriel), ni chauffé, mariné, assemblé, le produit doit être « brut »
  • le plat est élaboré sur place

Sont autorisés :

  • les produits épluchés, sauf les pommes de terre (friiiiiiiiites)
  • les produits pelés, tranchés, coupés, découpés, hachés, nettoyés, désossés, dépouillés, décortiqués, taillés, moulus, broyés (oui, si les restaurateurs doivent aller eux-même cueillir leur curcuma, cardamome, coriandre… les broyer et constituer leur curry maison, on n’ pas fini; mais ce critère semble discutable pour les fruits et légumes coupés par exemple…)
  • les produits fumés, salés
  • les produits réfrigérés, congelés, surgelés, conditionnés sous vide (le règne des Saint-Jacques toute fraîches n’est pas encore arrivé…)
  • les salaisons, saurisseries, charcuteries, à l’exception des terrines et des pâtés
  • les fromages, les matières grasses alimentaires, la crème fraîche, le lait
  • le pain, les farines, les biscuits secs
  • les légumes et fruits secs et confits
  • les pâtes, les céréales (c’est discutable, les pâtes maison, ce n’est pas si compliqué pour les restaurateurs!)
  • la choucroute crue, les abats blanchis
  • la levure, le sucre, la gélatine
  • les condiments, épices, aromates, concentrés, chocolat, café, tisanes, thés, infusions
  • les sirops, vins, alcools, liqueurs
  • la pâte feuilletée crue
  • sous réserve d’en informer par écrit le consommateur, les fonds blancs, bruns et fumets (mouais…)

A bas les mauvaises sauces tomates toute prêtes sorties d’un pot et les frites surgelées cachées sous le mensonge du fait maison! Ouf.

 

Pas assez « maison »?

Des restaurateurs demandent le statut d’artisan comme pour les boulangers, bouchers… Et des critères plus stricts pour le label « fait maison », par exemple, exit les produits découpés.

C’est un début, peut-être que le label sera précisé à nouveau ultérieurement. Au vu de tous les restaurateurs qui nous proposent de la nourriture de mauvaise qualité et mentent sur celle-ci, on se dit qu’il y a déjà beaucoup de travail, et que ce label aidera déjà les consommateurs que nous sommes à s’y retrouver.

Le label offre aussi une reconnaissance aux restaurateurs qui font vraiment la cuisine. Les autres devraient s’appeler des réchauffeurs, peut-être? Et offre aussi un gage de qualité pour les clients donc!

Faites un blind test à la maison : boîte de petits pois contre petits-pois fraîchement cueillis achetés sur le marché (et cuits!). Je ne pense pas qu’on puisse se tromper.

En outre, il n’y aura pas de contrôle a pirori, les restaurateurs feront eux-même les modifications dans leurs cartes, ou leurs habitudes. Bien sûr, la DGCCRF (Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes) pourra contrôler a posteriori la conformité des mentions « fait maison ». Reste à savoir s’il y aura de nombreux contrôles après la date limite de mise en conformité du 1er janvier 20015 dans les restaurants français!

Dans un pays où la gastronomie est reconnue – je vous rappelle que le repas gastronomique français est inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Unesco – il est dommage de croiser souvent le chemin de restaurateurs qui osent faire passer leurs plats pour de la nourriture, et même de la nourriture faite maison. Combien de fois ai-je demandé à un serveur si la sauce salade (qu’y a-t-il de plus simple qu’une vinaigrette?) était maison? Et combien de fois m’a-ton assuré qu’elle l’était? Et combien de fois encore mon (si délicat) palais a constaté qu’il n’en était rien en fait?

Sans compter que les plats industriels vendus aux restaurateurs qui nous le revendent à leur tour sont à des prix très attractifs, et ces même restaurateurs se font donc de jolies marges sur ces mensonges au goût définitivement pas terrible.

Bref, ce label est une bonne idée – qui arrive un peu tard, mais vous connaissez les diction… – et on a hâte de voir ce que vont devenir les cartes des mauvais restau qu’on a repérés, et surtout de se régaler dans les bons restaurants qui afficheront le label « fait maison »!

 

Que pensez-vous du label « fait maison »?

Rédigé par

Marie-Aube

Rédactrice web et print indépendante depuis plus de 10 ans, auteure et blogueuse, passionnée par l’écriture. So What ? est mon blog, engagé, féminin, créatif, drôle et sérieux.